F&B : un levier de croissance pour l’hôtellerie ?

You are currently viewing F&B : un levier de croissance pour l’hôtellerie ?
  • Temps de lecture :5 min de lecture

Après une longue période de désamour, le F&B regagne du terrain dans le secteur hôtelier. Design, gastronomie, ambiance, honesty bar… Autant de formules qui permettent d’ouvrir l’hôtel à la clientèle extérieure et contribuent au chiffre d’affaires.

Dans l’hôtellerie, la restauration a longtemps été considérée comme un mal nécessaire”, rappelle Serge Trigano, à la tête de Mama Shelter. Mais aujourd’hui, les choses changent. “Les hôtels 3 étoiles et plus montrent un regain d’intérêt pour le F&B [food and beverage, NDLR]. Cela correspond à un changement d’état d’esprit et de business model : on souhaite que l’hôtel s’ouvre vers l’extérieur et devienne un lieu de vie pour la clientèle locale, et on cherche à optimiser la surface. Certains établissements comme Hoxton ou Mama Shelter ont même mis le F&B au cœur de leur business model. En revanche, cela n’entre pas dans le business model du segment économique – les 1 et 2 étoiles -, dont le but est de garder les charges de personnel au minimum”, observe Joanne Dreyfus, responsable tourisme et hôtellerie chez Deloitte.

500 à 800 couverts par jour chez Mama Shelter

Mama Shelter a été l’une des premières marques à adopter cette stratégie, il y a dix ans. “Un Mama, c’est un bar-restaurant avec des chambres au-dessus. On a pris le contrepied de tout ce qui se faisait alors. On nous avait dit que la clé pour un hôtel, c’était l’emplacement, et qu’il ne fallait pas proposer de F&B. Les grands consultants nous expliquaient que notre concept ne marcherait jamais. 80 groupes financiers m’ont refusé le projet. Et pourtant, Mama Shelter a fonctionné au-delà de nos espérances”, raconte le fondateur. Les établissements du groupe, qui vise les 20 hôtels en 2021, assurent en moyenne 55 % du chiffre d’affaires grâce à la restauration, soit 500 à 800 couverts par jour. À Belgrade, le F&B s’envole même jusqu’à 65 % du chiffre d’affaires, avec 1 200 couverts quotidiens. Pour attirer la clientèle locale et “faire entrer l’énergie de la ville”, les établissements misent sur des designers et décorateurs de renom (Philippe Starck, Thierry Gaugain…), des rooftops, un staff “plein de simplicité et de bonne humeur”, une “ambiance bon enfant, chaleureuse et un peu sexy”, des animations (DJ, brunch…) ou encore une cuisine de qualité et abordable. Le triple étoilé Guy Savoy a ainsi pris la relève d’Alain Senderens à la supervision de la carte. Les tarifs, quant à eux, permettent de “grignoter une pizza” à partir de 12 € ou de déjeuner pour 22 €.

Une vitrine pour l’hôtellerie

Pour se démarquer et rendre le lieu attractif, un restaurant d’hôtel doit être visible de l’extérieur et avoir une âme. Mais encore faut-il faire tourner le chiffre d’affaires, car les gens peuvent avoir tendance à rester longtemps sans trop consommer”, prévient Joanne Dreyfus. Et Serge Trigano de concéder : “Il est plus facile de gérer des grosses unités que des petites structures de 25 ou 30 couverts.” Arnaud Payet Montech, directeur de l’hôtel 4 étoiles La Résidence du Vieux-Port, à Marseille, en fait l’expérience. Son établissement de 45 chambres à la décoration rétro possède un restaurant de 28 places assises (et 36 en terrasse), Le Relais 50. Le chef Noël Baudrand, qui a reçu le prix Jeune Talent du Gault&Millau en 2017, a permis de faire progresser les recettes en F&B, qui avoisinent désormais les 10 % du chiffre d’affaires. “Dans un 4 étoiles, le F&B est un plus en termes d’image. C’est un service supplémentaire pour les clients. C’est aussi une vitrine qui permet de faire connaître l’établissement et d’amener une nouvelle clientèle”, reconnaît-il. Cependant, seuls 30 % des clients de l’hôtel fréquentent le restaurant. “Notre point faible, c’est que nous n’avons pas de bar dans l’hôtel : une fois que les clients se donnent rendez-vous dans un bar voisin, on a du mal à les recapter pour le dîner”, constate-t-il. Pour aimanter cette clientèle, l’hôtelier a donc mis en place une réduction de 10 % sur l’addition et un honesty bar dans le lobby. Les résultats sont en progression, mais “sans étoile au Michelin, il faut se battre tous les jours”, admet Arnaud Payet Montech.

Source : F&B : un levier de croissance pour l’hôtellerie ?