Responsable du développement durable : un métier qui a du mal à s’imposer

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Hôteliers et restaurateurs perçoivent la protection de l’environnement comme une source d’économies en énergie et consommation d’eau. Malgré cela, la tâche est souvent confiée à un salarié déjà en poste ou fait l’objet d’un effort collectif.

“En cinq ans, je n’ai été confrontée qu’une seule fois à un hôtelier qui cherchait à recruter une personne sensible au développement durable.” C’est le bilan que dresse Valérie Bisch, fondatrice du cabinet de recrutement Tovalea. Pour cette ancienne directrice commerciale et marketing du Crillon, à Paris (VIIIe), une stratégie se met en place pour protéger l’environnement que “si le propriétaire ou le directeur de l’établissement est lui-même sensibilisé à la problématique”. Valérie Bisch reconnaît toutefois que des mesures sont souvent prises, dans les petites structures indépendantes et autres PME, dès que l’on démontre que le développement durable peut être une source d’économies en énergie et consommation d’eau. Autrement dit : “S’il y a un intérêt financier.”

Il n’en demeure pas moins qu’aucun responsable du développement durable, proprement dit, n’est nommé. La tâche est soit confiée à un salarié déjà en charge, par exemple, des ressources humaines, soit chacun met la main à la pâte. C’est le cas dans les cuisines du Saint-James à Bouliac (Gironde), où le chef étoilé Nicolas Magie initie lui-même les membres de sa brigade à la lutte contre le gaspillage alimentaire.

Faire du développement durable “un avantage compétitif”

Le vrai pas en avant, en matière de recrutement lié au développement durable, s’observe davantage au sein des groupes. Car les budgets nécessaires ont été débloqués et le personnel sensibilisé, voire formé. Le programme Planet 21 d’Accorhotels “accélère et intensifie son engagement dans le développement durable pour en faire un avantage compétitif décisif”, explique-t-on au sein du groupe. Un groupe mobilisé depuis longtemps sur les liens entre écologie et économies : dans ses hôtels, la consommation d’eau par chambre louée a été réduite de 12 % entre 2006 et 2010 et la consommation d’énergie par chambre disponible de 5,5 %.

Même dynamique chez Mandarin Oriental. De 2011 à 2014, Caroline Dumas a fait partie du comité développement durable, mis en place au moment de l’ouverture du Mandarin Oriental parisien. Dépêchée pour le superviser, l’animer et former les salariés, elle souligne elle aussi l’importance de l’implication du directeur général de tout établissement qui souhaite mener des actions en faveur de l’environnement. “Même si les responsables du développement durable se font encore rares dans l’hôtellerie et la restauration, souvent faute de budget, on prend conscience de la situation, des efforts sont réalisés”, ajoute Caroline Dumas, désormais consultante indépendante. D’ailleurs, à son niveau, elle privilégie les clients sensibilisés au développement durable. Tous comme Valérie Bisch : “J’incite les restaurateurs, par exemple, à préférer un chef qui travaille des produits frais et locaux.” Et la plateforme Jobboard, qu’elle a mise en place chez Tovalea, va plus loin encore en permettant d’évaluer les recruteurs. “De plus en plus d’écoles et de lycées hôteliers sensibilisent les jeunes au développement durable”, conclut Caroline Dumas. C’est bon signe. À l’instar de la création d’une commission développement durable au sein de l’Umih.

Source : Anne Eveillard – Responsable du développement durable : un métier qui a du mal à s’imposer