Le tourisme de masse pourrait ne pas survivre au Covid-19

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Le tourisme est un secteur stratégique pour l’Europe, il pèse 10 % de son PIB. Pour relancer la machine, le commissaire européen Thierry Breton souhaite un “plan Marshall du tourisme”, mais appelle à réfléchir à un secteur plus durable et résilient. Face aux désastres générés par le tourisme de masse, la crise du Covid-19 pourrait avoir l’effet d’un électrochoc. L’exemple est frappant à Venise qui, allégée de millions de touristes, redécouvre la beauté de ses canaux assainis.

En Europe, le secteur du tourisme emploie 25 millions de personnes. Or c’est un des secteurs les plus ravagés par le Coronavirus. Avec le confinement, la fermeture des frontières, des bars, des restaurants… C’est un pan majeur de l’économie du continent qui est touché. Mais pas encore coulé, croit Thierry Breton, Commissaire européen en charge du marché intérieur. Il appelle à un “plan Marshall du tourisme” en référence au célèbre programme d’aide financière mis en place après la Seconde guerre mondiale pour aider à la reconstruction de l’Europe.

“Nous avons besoin d’un véritable plan Marshall pour le tourisme européen. J’estime qu’il faudra y consacrer de l’ordre de 20 % de toute l’enveloppe dédiée à la relance de l’économie, qui pourrait atteindre quelque 1 500 milliards d’euros si on y consacre 10 % du PIB européen, comme le font par exemple les États-Unis ou l’Allemagne. L’Europe représente 50 % du tourisme mondial, il faut sauver cette position dominante”, prévient Thierry Breton dans les Échos.

Mais derrière l’urgence de remettre sur pied le secteur, le commissaire européen appelle à repenser, en profondeur, le modèle du tourisme actuel qui a déjà montré d’importants signes de faiblesse à l’instar du voyagiste Thomas Cook. Ce dernier, englué dans une dette trop lourde et concurrencé par les sites de réservation sur internet est devenue le symbole d’une financiarisation trop forte de l’économie, en se déclarant en faillite le 20 septembre dernier.

“Un tourisme européen durable, innovant et résilient”

Pour repenser ce tourisme à bout de souffle, Thierry Breton a ainsi proposé l’organisation à l’automne d’un sommet européen du tourisme qui aura pour objectif de “réfléchir ensemble à l’après et de construire une feuille de route vers un tourisme européen durable, innovant et résilient”. Dans un billet sur Linkedin, il explique : “Le tourisme doit être au cœur du Green Deal européen et promouvoir le tourisme durable face au tourisme de masse que l’on observe dans certaines villes ou régions. Il s’agira de trouver un équilibre entre la préservation des écosystèmes et les réalités économiques”.

Et cette réflexion est partagée par plusieurs organisations comme l’association des Acteurs du tourisme durable (ATD). “Le tourisme doit aujourd’hui se transformer pour devenir un tourisme à impacts positifs, que ce soit pour l’Homme, pour l’environnement et les territoires”, appelle l’association. Les villes prennent également conscience de l’urgence. En premier lieu, la ville de Venise, très prisée par les touristes. Alors que depuis une cinquantaine de jours la Cité des Doges retrouve son calme perdu et la clarté de ses eaux, les habitants, et le maire, redécouvrent les bienfaits d’une ville allégée du poids des millions de touristes et de bateaux de croisière.

Les élus pensent même à instaurer des quotas alors que, l’année dernière, plus de 30 millions de personnes ont foulé le sol de la cité italienne. “C’est aussi l’occasion d’aller vers un tourisme intelligent. Avec des touristes qui prennent le temps de comprendre et ainsi de sortir des circuits frénétiques d’autrefois”, explique, dans un reportage de France Info, Simone Venturini, maire-adjoint de Venise, chargé du développement économique.

Les villes prennent la main

Le tourisme de masse permet à des populations au faible pouvoir d’achat de partir pour peu cher, mais au prix d’une dégradation de l’environnement. En 2018, une étude publiée dans Nature Climate Change estimait que le secteur représentait 8 % des émissions de gaz à effet de serre mondiales en raison notamment des transports aériens. Sans compter les nuisances sonores, les transports saturés, les déchets dans les rues, les plages bondées… À Barcelone, Rome, Amsterdam le tourisme de masse, même s’il crée des emplois, nuit à la qualité de vie des locaux. Notamment en générant une pression immobilière à travers par exemple des plateformes entre particuliers comme Airbnb.

À Paris, en cinq ans, 20 000 logements sont ainsi devenus des locations touristiques, faisant monter les prix dans la capitale. Mais le Covid-19 pourrait bien changer la donne. Alors qu’Airbnb subit de plein fouet la pandémie avec des taux d’annulation proches de 90 % selon le cabinet spécialisé AirDNA, certaines villes en profitent pour reprendre la main sur le marché immobilier. À Prague par exemple, les autorités ont utilisé l’état d’urgence déclaré pour accélérer la mise en place d’un plan permettant de mieux contrôler les locations à court terme. Il faut dire que le centre-ville se dépeuple de plus en plus de ses habitants, les loyers étant montés en flèche.

Source : Le tourisme de masse pourrait ne pas survivre au Covid-19