Accords mets et vins : les principes fondamentaux

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“Les vins sont faits pour être, comme les diamants sur une bague, enchâssés dans un repas.” Pierre Poupon (Pensées d’un dégustateur)

Chaque accord mets et vin présente un cas particulier. Il faut tenir compte du plat, de la garniture, éventuellement de la sauce, de l’environnement, des vins disponibles, etc. La moindre modification de l’un de ces éléments peut changer l’accord souhaitable. Mais il ne faut jamais perdre de vue l’objectif hédoniste de l’accord : le but recherché est de se faire plaisir ou de faire plaisir à ses clients ou à ses amis. Un seul impératif : le plaisir des sens doit aller crescendo.

Il est par conséquent indispensable que la personne chargée de la vente des vins connaisse au moins l’origine et les caractéristiques de tous les vins proposés dans son restaurant. Il est difficile de bien vendre un produit sans le connaître parfaitement.

Un accord réussi peut procurer des moments rares, magiques, surtout lorsque le client sait qu’il peut faire confiance au sommelier ou à ceux qui en assurent les fonctions (maître d’hôtel, chef de rang, serveur,…). Ce climat de confiance permet de proposer le vin en harmonie avec le plat, ou, mieux encore, le plat en harmonie avec le vin. Cette confiance, le client est prêt à l’accorder, mais il ne le fera qu’en présence d’une personne qui connaît parfaitement les vins qu’elle propose et qui a les qualités requises (voir aussi la page consacrée au sommelier).

Pas de vin…

“Pas de vin sur les potages, les pamplemousses, les salades, les avocats, les asperges, les œufs, la plupart des desserts… ” Il n’est pas rare de lire ou d’entendre ces affirmations. Certes, quelques-uns de ces mets ne mettent pas particulièrement les vins en valeur. Toutefois, le métier de restaurateur consiste à vendre des mets et des boissons. Pour cela, il faut respecter certains principes auxquels il ne faut pas trop déroger, mais ils ne doivent pas devenir un carcan et freiner exagérément les ventes.
Un muscat d’Alsace sec avec les asperges, un beaujolais nouveau servi frais avec une omelette, un petit verre d’armagnac, de liqueur à base d’orange ou d’un vieux banyuls avec la mousse au chocolat, laisseront certainement une excellente impression à notre convive, et auront une influence bénéfique sur le chiffre d’affaires du restaurateur.

Critères à prendre en compte

Les vins disponibles : il existe une différence entre les vins en stock et les vins disponibles, c’est-à-dire arrivés à maturité et aptes à la vente.
Les goûts personnels du client : élément important, trop souvent négligé. Si un client demande du vin rouge avec son poisson, on peut éventuellement lui faire remarquer qu’il fait preuve d’originalité, mais il ne faut en aucun cas le lui refuser !
Le nombre de convives : les très grands vins ne peuvent être appréciés qu’en petit comité.
La qualité des convives : cela peut paraître choquant, mais il faut également en tenir compte. À quoi bon servir un très grand flacon à des invités qui le boiraient comme un vin de table ou qui n’y prêteraient pas attention ?
La composition et la préparation des plats, qui vont avoir une influence sur la texture, un élément essentiel pour les accords vins et mets. Par exemple, il serait souhaitable d’éviter les vins fins et délicats (musigny, margaux, fleurie…) si la texture dominante est grasse.
Le type de repas : on ne sert pas les mêmes vins sur un dîner de gala et sur le repas de tous les jours. Une précision s’impose : ce serait une erreur de croire que les grands vins demandent des plats compliqués. Ils seront beaucoup mieux appréciés avec des plats simples, mais de qualité, plutôt qu’avec des préparations dont les caractères trop marqués ne permettraient pas au vin de s’exprimer.
Les types d’accords recherchés. L’accord horizontal ne concerne qu’un seul plat et un seul vin. C’est celui que l’on trouve le plus fréquemment dans les tableaux de concordance.
L’accord vertical tient compte du vin qui précède et du vin qui va suivre. “Le vin que l’on sert ne doit jamais faire regretter celui qui a précédé.” C’est cet accord que l’on pratique généralement lorsque l’on propose les vins pour un menu.
La saison : les vins rouges corsés, généreux s’apprécient mieux en hiver qu’au mois d’août. Lorsqu’il fait très chaud, il est préférable de choisir des vins frais et légers.
Les prix : un accord réussi n’est pas synonyme de coût élevé. Il existe, en France et dans tous les pays producteurs, des vins pour tous les goûts et toutes les bourses. Nombreux sont les vins de qualité à des prix très abordables (AOC régionales, IGP, etc.). Vous n’avez que l’embarras du choix.

Combien de vins au cours d’un même repas ?

Cette question est difficile car doivent être pris en compte le menu, les convives, le budget, etc. Actuellement, pour les menus dégustation, un nombre important de vins est souvent servi, parfois autant que de mets. Pour les non-initiés, cela peut paraître excessif. C’est oublier le principe du menu dégustation : de nombreux plats en petite quantité. Pour un œnophile, la quantité de chaque vin a peu d’importance. Il y a là un créneau à exploiter plus souvent par les restaurateurs. Dans cette formule, soit le vin est inclus dans le prix du menu, soit on prévoit un forfait vin. Dans tous les cas, la quantité de vin prévue doit être précisée.
Dans le cas d’un menu classique, il n’est pas souhaitable de servir un trop grand nombre de vins. Deux, voire trois, semble un nombre tout à fait raisonnable, et l’accent doit être mis sur l’aspect découverte.
En revanche, il est possible d’aller au-delà avec la formule du vin au verre, très appréciée par les clients. En effet, cela permet de présenter deux vins sur un même plat, en proposant par exemple 2 x 5 cl ou 2 x 6 cl (au lieu de 10 ou 12 cl).

Un peu d’imagination

Parmi les plaisirs que peut procurer un accord réussi, il en est un qui n’est pas toujours pris en compte : la découverte. En proposant par exemple un vin rouge sur un poisson, un champagne sur une viande rouge… L’approche sera différente pour une table individuelle et un repas prévu à l’avance et regroupant un nombre de convives plus important. Dans ce dernier cas, pourquoi ne pas proposer un thème ?

Quelques idées

Un menu dégustation avec des vins :
– d’un seul millésime,
– d’un seul cépage,
– d’une seule région ou d’une seule appellation,
– d’un seul producteur sur différentes appellations,
– primés (à Vinexpo, au mondial du vin à Bruxelles…),
– de chaque pays producteur de vin de la communauté européenne (ou hors communauté)
– d’Asie (Chine, Israël, Turquie, Liban, Thaïlande…),
– du continent américain ou d’un seul pays de ce continent : États-Unis, Chili, Argentine, Uruguay,
– d’Australie ou de Nouvelle-Zélande…

Exemple : menu dégustation et vins du Sud

– Salade de truite en escabèche fumée, saumure d’airelles au caviar – Crémant de Limoux Sieur d’Arques
– Tartare de canard et son haché fumé au vinaigre de cidre – Tavel du Vieux Moulin Roudil
– Filet de la marée du jour au jus de morilles et milhas – Picpoul de Pinet Pomerols
– Croustillant d’escargots en chabrot et asperges vertes – Coteaux du Languedoc Mas Julien
– Sorbet Coupo Santo Vieil élixir de vie – Carthagène Coupo Santo
– Chevreau de pays flanqué de cèpes, marrons, pommes fondantes – Faugères Alquier
– Noisettes de filet de bœuf aux grisets du mont Lozère – Fitou Château de Nouvelles
– Choix de fromages du Pays cévenol – Corbières Château Etang des Colombes (blanc ou rouge)
– Gratin de fruits frais au sabayon de muscat mentholé – Muscat de Frontignan Le Perçage
– Entre amers et saveurs, l’assiette surprise – Banyuls Le Mas Blanc Docteur Percé
(par Patrick Pagès)

Source : Accords mets et vins : les principes fondamentaux