Les clients mystère aident les établissements hôteliers à progresser, en éliminant les mauvaises habitudes ou les détails fâcheux. Visite guidée.
Venus tester un établissement hôtelier incognito, les clients mystère peuvent avoir le visage d’un étudiant, d’un touriste étranger, d’un voyageur d’affaires… Des profils variés qui rendent leur détection d’autant plus difficile. « L’hôtellerie est l’un des secteurs à l’origine des visites mystère, comme le luxe et l’automobile. Dans l’hôtellerie, on est dans l’art de recevoir. Les gestes du métier sont très importants. Le client est autant sensible à l’hébergement qu’au savoir-être des collaborateurs. Les visites mystère se sont répandues dans les chaînes, car le client mystère est le seul lien entre la marque en franchise et le vécu du client”, explique Ludovic Nodier, directeur de BVA Mystery Shopping. Ces visites mystère se sont tout d’abord répandues dans le haut de gamme (depuis la loi Novelli du 22 juillet 2009, la visite par un client mystère est obligatoire à partir de la quatrième étoile), avant de conquérir le segment milieu de gamme. « C’est un outil pour garantir la régularité de l’expérience client, qui vient s’ajouter à d’autres indicateurs comme les commentaires des réseaux sociaux, les questionnaires de satisfaction client ou les auto-évaluations. Cela permet également d’avoir une comparaison et un benchmark par rapport à nos compétiteurs sur une base de plus de 700 standards communs”, souligne Geoffray Maugin, senior vice-président Guest Experience pour les marques luxe et haut de gamme d’Accor. “Les chaînes cherchent ainsi à vérifier certains standards. Pour les indépendants, il s’agit plus d’avoir une vision différente de ce qu’ils peuvent vivre au quotidien. Quand on a le nez dans le guidon, on ne voit pas forcément ce qu’il se passe dans son hôtel« , ajoute Jean-Pierre Tedog, client mystère en hôtellerie de longue date.
Détails à la loupe
Les visites mystère peuvent se limiter à une nuit, et durer jusqu’à une semaine dans les hébergements de loisir, en suivant ou non un scénario préétabli. Selon la demande de la chaîne ou de l’établissement, elles se répètent à un rythme mensuel ou trimestriel. Certaines portent plus sur le savoir-être des collaborateurs, tandis que d’autres s’apparentent à des audits, vérifiant plusieurs centaines de critères et leur conformité par rapport aux standards établis. Les visites explorent à la loupe les différents services (accueil, bagagerie, ménage, blanchisserie, literie, restaurant, bar…), et donnent lieu à la rédaction d’un rapport noté, précis et argumenté. « L’accueil ne doit pas être obséquieux, mais courtois et pratique. Il faut que la tenue soit propre et correcte, que le ménage soit impeccable, même derrière les radiateurs. Quand on voit le chef avec un tablier dégoûtant, ça ne passe pas… Parfois, les architectes se font plaisir, c’est joli, mais ce n’est pas forcément commode. Par exemple, un 5 étoiles avait une suite exceptionnelle, mais aucune prise n’était disponible pour brancher un téléphone portable ou un ordinateur”, commente Jean-Pierre Tedog. Certains clients se démasquent à la fin de leur séjour, et échangent alors de vive voix avec la direction de l’hôtel. Quant au coût d’une visite, il varie en fonction de la durée, de la complexité, du statut de l’hôtel (franchisé ou indépendant) et de sa taille, du prestataire embauché (société spécialisée en visites mystères, client VIP, consultant ou professionnel de l’hôtellerie…). Les tarifs peuvent ainsi débuter autour de 250 €, et grimper jusqu’à plusieurs milliers d’euros.
Plan d’action
Et après ? “Chaque département fait ses plans d’action, renforce certains points, compare le rapport avec les questionnaires de satisfaction. C’est une source qui nous aide à nous remettre en cause. Parmi les changements apportés, cela peut aller d’un hôtel qui s’est équipé d’un coffre-fort plus grand pour être à la taille des ordinateurs, jusqu’à la réorganisation d’un service de bagagerie pour être plus efficace”, note Geoffray Maugin. Pour Ludovic Nodier, “les visites mystère peuvent servir dans les primes des employés, ou dans les bonus-malus qualité pour les contrats de franchise. Cela maintient les équipes dans une émulation positive. C’est un dispositif d’amélioration continue. Ce qui est intéressant, c’est le plan d’action mis en place derrière, à condition que cela soit bien vécu par les collaborateurs et que ce soit une démarche de progrès. Il faut améliorer ce qui est négatif et aussi capitaliser sur les bonnes choses : si l’accueil est super, il faut partager cette bonne pratique avec l’ensemble des collaborateurs et les féliciter”.